vendredi 22 octobre 2010

2010-10 Hiroshima

Venant nous voir pour la deuxième fois au Japon, mes parents décident de s'aventurer plus loin de Tokyo, et le choix se porte sur Hiroshima et Kyoto, auxquelles je propose d'ajouter Miyajima, proche de Hiroshima et l'un des lieux les plus appréciés au Japon.

Partant de bonne heure le matin de Tokyo, 5h plus tard nous arrivons à Hiroshima et grimpons dans l'une des curiosités de cette ville : le tramway. Hiroshima est en effet l'une des seules villes du Japon à avoir un réseau de tramway.

Après avoir déposé nos affaires dans le petit hôtel, nous nous dirigeons vers le parc de la paix (Heiwa-koen), lieu de commémoration des atrocités de l'ère nucléaire.
Hiroshima est située non loin de la mer, et de nombreux cours d'eau la traversent (on y trouve d'ailleurs des méduses remontées de la mer) ; sur la droite, le parc de la paix :

Dans ce parc, se trouvent deux musées commémoratifs, l'un historique et l'autre mémoriel (avec témoignages), et de nombreux monuments.

L'axe principal : le cénotaphe, la flamme de la paix et le dôme de la bombe A :
Vue vers la flamme de la paix, le cénotaphe et le musée historique :

Ci-dessous, le monument dédié aux enfants morts de la bombe et de ses conséquences ; il fut érigé suite à une histoire tragique qui fit le tour du Japon : une jeune enfant fut atteinte de leucémie suite à la bombe, et se mit à construire des grues de papier, espérant atteindre le nombre de 1000 grues de papier réalisées, car une croyance shinto veut que le voeu se réalise si la personne parvient à faire les 1000. Hélas, elle mourut avant d'y parvenir, et son histoire inspira plein d'autres enfants à construire des grues de papier pour terminer la tâche qu'elle n'avait pas eu le temps de compléter. Logiquement, le monument des enfants reprend le thème des grues de papier :
Autour de ce monument se trouvent des armoires en verre dans lesquelles on peut déposer ses propres (guirlandes de) grues en papier ou collage sur le thème :
De l'autre côté du bras de rivière se trouve le dôme de la bombe A. C'est l'unique bâtiment resté en l'état dans lequel il se trouvait après le bombardement : tous les autres ont soit été détruits totalement lors de l'explosion soit ont été rasés lors de la reconstruction. A l'époque ils ont d'ailleurs hésité à le détruire lui aussi (pour ne pas garder apparent le symbole d'une dévastation et de mauvais souvenirs), mais il a finalement été décidé de le garder pour mémoire :
La photo ci-dessus est prise du pont visible sur la photo ci-dessous :
C'est un pont en forme de T, et c'était l'objectif visé par la bombe. Elle a en fait explosé environ 100 mètres à côté (et à 600 mètres d'altitude), tout proche du dôme de la bombe A, ce qui explique que ce bâtiment soit resté debout, se trouvant quasiment à la verticale de l'explosion ; les bâtiments en dehors de cette verticale ont tous été totalement soufflés ; seuls 3-4 immeubles sont restés en partie debout (à part bien sûr lorsque l'on s'éloigne de l'épicentre de 1km et plus).

La cloche ci-dessous sonne tous les matins à 8h15, pour commémorer l'heure à laquelle la bombe a explosé :

Le tertre : ce qui est aujourd'hui le parc de la paix était auparavant un quartier central d'Hiroshima. Situé à l'épicentre de l'explosion tous les gens qui s'y trouvaient sont morts dans l'instant ou presque. Les travaux de sauvetage et de déblaiement ont commencé dans la journée même, avec très peu de moyens, sans système de transport et des rues encombrées de gravats, de bâtiment détruits et de corps ; de nombreuses victimes ont donc été regroupées sur place et reposent sous ce monticule :

Le monument pour les Coréens : de nombreux Coréens (et en moindre mesure Chinois) avaient été déporté au Japon pour y travailler de force ; une proportion non négligeable des victimes est donc Coréenne :

Après cette balade émouvante dans le parc de la paix, nous sommes allés au musée historique, dont la première partie est très intéressante. On y apprend notamment
- sur le rôle militaire tenu par Hiroshima (l'une des 6 divisions japonaises y était basée),
- sur les difficultés de la vie quotidienne en temps de guerre pour les civils (réquisitions, rationnement, exercices militaires, ...),
- sur les critères utilisés pour sélectionner quelles villes seraient bombardées nucléairement (la short list incluait notamment Hiroshima, Nagasaki, Kyoto, Niigata, et les critères étaient : un centre ville plat, d'au moins 4km de circonférence, pas ou peu bombardée pour pouvoir clairement déterminer l'impact de la bombe nucléaire, pas de prisonniers alliés, etc.),
- sur les succès et problèmes rencontrés par le projet Manhattan (coûts exorbitants, pas de résultat visible pour justifier ces coûts à moins de larguer une bombe, ...),
- sur les problèmes moraux (certaines personnes se sont battues pour prévenir la population d'Hiroshima d'évacuer, mais ils furent minoritaires et la population ne fut pas prévenue),
- sur la reconstruction (recommencée dès le lendemain, l'électricité rétablie 3 jours après, et le tramway 5 !).
Les dernières parties montrent des objets récupérés à différents endroits d'Hiroshima : vêtements calcinés, tuiles fondues, murs constellés de bouts de verre y étant été projetés, ...

Cette visite est édifiante et très bien balancée, pas du tout manichéenne : les atrocités japonaises en Chine et en Corée sont mentionnées et condamnées sévèrement, les dirigeants à la politique belligérante sont pointés du doigt, et la politique américaine est présentée sous ses deux jours.

Le soir, on se rend dans un bâtiment dont les premiers étages sont des petits restaurants qui tous proposent la spécialité d'Hiroshima, les okonomiyaki :
Entre l'omelette, la crêpe, le pancake (et avec beaucoup de chou chinois) : excellent !

Le lendemain, lever tôt, ce qui nous permet d'entendre, en traversant le parc de la paix, la cloche sonner 8h15.

On se dirige vers le château d'Hiroshima, reconstruit après le bombardement :
Un arbre qui a subit la bombe A mais qui a survécut :
Dans l'enceinte du château, un sanctuaire semblant neuf :
Je vous présente le Kinmokusei : grand arbuste (ou petit arbre), il possède des petites fleurs qui embaument littéralement les rues japonaises entre septembre et octobre (certains enfants, quand ils sentent cette odeur, s'écrient "ça sent les toilettes !" car la plupart des déodorants japonais pour toilettes sont parfumés par cette fleur ^^) :
Toujours dans l'enceinte du château, les restes du commandement militaire impérial de Hiroshima (pas reconstruit, lui) ; c'est là que l'empereur résidait et commandait lorsqu'il venait à Hiroshima lors de la guerre en Asie et la seconde guerre mondiale :
Le donjon :

Puis nous marchons vers le Shukkei-en, un très beau jardin à la japonaise (évidemment également reconstruit depuis 1945), avec toutes les caractéristiques : ponts de diverses formes, dalles de pierre, petits sentiers, arbustes et pins taillés artistiquement, îles de pins, dénivelé pour permettre d'admirer le jardin sous différents angles, cascade de pierre, cascades et ruisseaux, pavillons pour se reposer et admirer, maisons de thé, ...
Je vous laisse admirer les photos :
(question : le système pour de ne pas avoir à monter puis descendre le pont est-il d'origine ?)
Une grande rivière borde le jardin sur l'un de ses côtés :C'est effectivement un très beau lieu pour des photos de mariage (ou de mode) :

Puis on retourne vers le parc de la paix, passant dans le Hiroshima moderne :
Système judicieux pour ne pas en perdre en chemin :
Retour au parc de la paix où l'on visite le mémorial ; y sont disponibles des témoignages de gens ayant survécu à la bombe et qui racontent cet événement sous leurs divers angles, y compris celui des hôpitaux de fortune improvisés et des soins problématiques des blessures, même dix ans après (la médecine ne savait pas encore comment soigner ces irradiés, ni toutes les maladies qui apparaîtraient à long terme) . Cela permet de mieux se rendre compte du côté humain de la journée (le musée historique permettant d'en comprendre les aspects géopolitiques, stratégiques, etc.).
A l'entrée du musée, une fontaine, dédiée à tous les irradiés qui avaient très soif et qui ne pouvaient trouver d'eau dans cette journée d'été torride :


Tout au cours de ce voyage, maman est fascinée par les symboles et les panneaux, dont en voici quelques uns :
- téléphone international :- ce qu'il est interdit de faire dans la rue et les amendes afférentes :- un cendrier, interdit aux moins de 20 ans (20 ans est l'âge de la majorité, et il est interdit de fumer avant)- panneau indiquant un magasin avec possibilité de manger, d'acheter des boissons au distributeur, et de boire du thé traditionnel (poudre de thé mélangée avec un fouet) :- interdictions dans le musée :

Après avoir pris notre temps dans le beau musée mémoriel, nous reprenons nos affaires et partons pour Miyajima.

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